Des émeutes ? Quelles émeutes ?
Par Abdelaziz Dahmani
Jeune Afrique du 11/01/1984
On peut compter sur les doigts de la main les grandes villes ou gouvernorats (il y en a 23) qui n’ont pas manifesté leur courroux lors des émeutes du début de l’année. Bizerte, Mahdia, la région du Cap Bon, et notamment Nabeul, sont restées calmes.
A Bizerte, l’indifférence a joué dans les deux sens. Point d’hostilité à l’annonce de l’augmentation du prix du pain, point de joie collective lorsque la mesure a été rapportée. « Bizerte a déjà payé un lourd tribut de sang pour sa libération en 1960 », disent ses habitants.
Même calme à Mahdia, y compris dans les lycées. Pourquoi ? Un pâtissier de centre-ville me répond malicieusement : « c’est pour ne pas gêner Si Tahar (Belkhodja) et Si Mohamed (Masmoudi) », deux célèbres fils de la cité, actuellement en disgrâce.
La région de Mahdia n’a pas bougé non plus. Sauf à Chebba, un dynamique port de pêche, où on a brûlé une manufacture travaillant le cuir et fabriquant de la lingerie. Elle appartient à un hollandais et fonctionnait exclusivement pour l’exportation. Une affaire obscure : le feu aurait été allumé par le père de l’une des ouvrières qui avait découché… Trois cent employés sont depuis au chômages. On est loin du prix du pain.